Maintenir la pression pour le retrait de la loi Travail
Invité à célébrer au théâtre du Rond-Point les 80 ans du Front populaire, le président de la République a tenu un discours de bilan après quatre ans de présidence, se déclarant notamment « réformiste, régulationniste, favorable au compromis et au dialogue social ».
Réformiste ? Plutôt réformateur dans une logique libérale sociale. Régulationniste ? C’est tout le contraire, notamment avec le pacte de responsabilité. Favorable au compromis et au dialogue social ? C’est tout le contraire encore, notamment avec la loi Travail, tant en termes de modalité de concertation que de contenu.
Ne pas faire ce que l’on dit ou faire le contraire de ce que l’on dit devient une spécialité.
Au passage, comme son prédécesseur à la présidence, il a critiqué « ceux qui pensent qu’en étant nombreux dans la rue, on peut empêcher ».
Mais surtout, en continuant à vanter, dans le projet de loi Travail, l’inversion de la hiérarchie des normes il rompt avec une logique républicaine visant à assurer, à travers l’accord national de branche, un minimum d’égalité de droits et de régulation.
Il fait preuve également d’une méconnaissance de la réalité de la vie en entreprise en cas de situation difficile, que peuvent par exemple subir les PME et leurs salariés en situation de sous-traitance avec un donneur d’ordres.
Nombre d’employeurs ne s’y trompent pas. Ils lui sont reconnaissants de certaines mesures contenues dans le projet actuel : sur la définition du licenciement économique, sur les accords offensifs pour l’emploi, sur la flexibilité dans l’organisation du travail ou sur la possibilité, par accord d’entreprise, de ne majorer les heures supplémentaires qu’à 10 % au lieu de 25 %.
À tomber à pieds joints dans le culte de la compétitivité-prix, via le coût du travail, il oublie (ce que rappelle régulièrement le Bureau international du travail) que l’amélioration de cette compétitivité pour l’un implique une dégradation pour un autre et qu’on rentre alors dans la course à l’échalote du moins-disant social. C’est la même chose pour le commerce extérieur : pour que l’un exporte plus, il faut que d’autres importent plus.
C’est pour toutes ces raisons, notamment, que Force Ouvrière n’acceptera jamais l’inversion de la hiérarchie des normes prévue dans le projet de loi Travail, ou plutôt anti-travailleurs, et que nous continuons à demander son retrait pour rediscuter de l’ensemble.
Le débat au Parlement a débuté. Une majorité n’est pas acquise. Alors maintenons la pression. C’est une question de droits et de dignité sociale, économique et républicaine.
QU’EST-CE QUE LA HIÉRARCHIE DES NORMES ?
De manière générale (pas seulement dans le droit du travail), les différentes « normes » (règles obligatoires) sont organisées de manière pyramidale : la Constitution ne doit pas être contraire à un traité international signé par le pays (bien que certains juristes s’opposent sur ce point), une loi doit être conforme à la Constitution, un contrat doit respecter la loi.
Le code du travail, lui, est régi par la loi. Les accords collectifs (de branche/secteur d’activité ou d’entreprise) ne peuvent pas être moins favorables aux salariés que ce que la loi dispose. L’accord d’entreprise ne peut pas être « moins disant » pour les salariés que l’accord de branche (sauf exceptions). Et, en dernier lieu, le contrat de travail ne peut pas être moins favorable que ce que prévoit l’accord d’entreprise.
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